«Réunification familiale» via les mêmes critères: de la poudre aux yeux! (PAPIER D’ANGLE)

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La montagne a accouché d’une souris. Des appels ou courriels reçus à la rédaction de l’Agence de presse «Média Mosaïque» laissent, en effet, comprendre que bon nombre d’Haïtiens sont déçus de l’annonce faite samedi par Ottawa. La communauté haïtienne exerce actuellement de fortes pressions sur les autorités dans le but d’accueillir des sinistrés ayant de la parenté au pays.

En fait, la disposition annoncée ne prévoit qu’une simple «accélération» dans le traitement des 1900 demandes de parrainage déjà effectués au Québec auprès de Citoyenneté et Immigration Canada. Une décision qui peut, sur cette angle précis, faciliter la tâche à certains de leurs compatriotes d’ici désireux de postuler en faveur de leurs proches en Haïti.

La seule nouveauté de la mesure Harper-Kenney: le délai de trois ans de rigueur, suite à la modification récente de la loi sur l’immigration par les Conservateurs, qui s’échelonne désormais sur trois mois. Un échéancier qui demeure très long vu le cauchemar, l’enfer sur terre qu’est devenue Port-au-Prince, il va sans dire, les autres villes avoisinantes terriblement dévastées par la catastrophe, ont déploré plusieurs personnes, leaders communautaires ou responsables d’organismes oeuvrant auprès des immigrants.

 

À peine 1% des Haïtiens d’ici seraient éligibles

Très peu d’Haïtiens d’ici, en dépit du malheur qui menace la «famille immédiate» dont ils disposent en Haïti, si l’on se borne aux critères en vigueur définis par Immigration Canada, sont actuellement aptes à profiter de ce processus acccéléré. Raison: pour l’heure, il n’y a que 1900 demandes en cours alors que les Haïtiens sont plus de 130 000 à résider uniquement dans la métropole québécoise. Montréal étant d’ailleurs considérée comme la ville occidentale détenant la plus forte quantité de ressortissants haïtiens, par proportion, au monde.

Quoique populeux comme regroupement ethnique au Québec, ils sont pourtant loin de figurer dans la palette des communautés culturelles les plus fortunées de la province où vivent plus de 90% d’entre eux au Canada. Bon nombre de ces gens ont de la difficulté à joindre les deux bouts pour subvenir aux besoins de leurs proches ici, voire qu’ils sont parallèlement obligés de faire des transferts d’argent réguliers à la famille établie en Haïti.

 

Blocage: l’argent, le critère de base

Viscéralement attachés au noyau familial, les Haïtiens, dès le premier jour de leur arrivée ici comme immigrants reçus, manifestent toujours l’envie de faire venir leur «famille immédiate» au Canada. Cependant, très peu d’entre eux peuvent arrimer leurs revenus au seuil minimal de revenu requis par l’administration fédérale. Un couple vivant au Québec  ayant trois enfants, postulant pour papa et maman incluant un frère et une sœur dépendant de ces derniers, doit prouver un salaire familial annuel de près de 75 000 dollars. Combien d’entre eux disposent d’un tel revenu?

Ces critères interdisent, comme on le sait, le parrainage des tantes et oncles, des cousins et cousines (qui font culturellement partie de la famille immédiate des Haïtiens), des beaux-frères et belles-sœurs, voire même les frères et sœurs dont l’âge dépasse la barre des 22 ans. Petite illustration: pour un frère et une sœur en faveur desquels un résident permanent ou citoyen canadien veut devenir le répondant, il faut prouver que ceux-ci demeurent sous la responsabilité de leurs parents là-bas et que ces éventuels parrainés doivent être aux études sans interruption. Alors que, c’est très courant de retrouver des Haïtiens de 35 ans et plus qui vivent encore ou qui dépendent pleinement de leurs parents en Haïti.

 

Pourquoi pas à titre de «réfugiés temporaires»?

Comme en témoignent certains, les autorités canadiennes peuvent largement s’inspirer de plusieurs précédents en matière d’immigration, d’autant que les porte-parole affirment que la communauté serait prête à faire sa part en les hébergeant. En effet, de plus en plus de voix, tant dans la communauté haïtienne que dans la société d’accueil, suggèrent au gouvernement d’offrir le statut de «réfugiés temporaires» aux sinistrés disposant de la parenté au Canada.

On évoque le cas des Vietnamiens qui ont été reçus grâce à la générosité de feu premier-ministre libéral du Canada, Pierre-Eliott Trudeau. L’accueil de plusieurs milliers de Kosovars lors de la guerre en ex-Yougoslavie à la fin des années 1990, la clémence du pays envers les  victimes du tsunami asiatique en 2004, font partie des exemples cités par bon nombre d’acteurs ou d’observateurs, dont l’ex-président de l’Assemblée nationale du Québec, Jean-Pierre Charbonneau et Lisa Frulla, ex-ministre du Patrimoine du Canada, analysant la situation jeudi sur les ondes de Radio-Canada.

Enfin, de plus en plus de gens sont unanimes à penser que si les autorités l’avaient fait par le passé pour les pays susmentionnés, il serait plus que logique de la part d’Ottawa d’agir de façon similaire en faveur d’Haïti, étant donné que la proximité et l’histoire partagées entre ce peuple de la Caraïbe et la Belle Province, notamment, ne sont plus à démontrer. 

 

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PHOTO MEDIAMOSAIQUE.Com/Cr Google (Le ministre la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme, Jason Kenney, à droite, chuchotant aux oreilles de son premier-ministre fédéral conservateur, Stephen Harper, à gauche)