MONTRÉAL – « Les obstacles aux investissements seront levés d’ici un an » en Haïti, tel est l’engagement public pris au Canada par le gouvernement haïtien par la voix de son ministre du Commerce et de l’Industrie, Wilson Laleau.
En entrevue à l’Agence de presse Médiamosaïque, Wilson Laleau a fait savoir que son équipe travaille d’arrache-pied en vue de lever les entraves liées aux investissements. « C’est un processus », a-t-il expliqué alors qu’il était invité à déchiffrer le fameux slogan du président haïtien Michel Martelly et de son chancelier Laurent Lamothe, à savoir qu' » Haïti est ouverte au business « .
Laleau, qui s’attend à ce que les Québécois et les Canadiens reprennent bientôt goût, comme par le passé, à devenir les principaux consommateurs du tourisme haïtien, pense que le secteur privé haïtien, connu pour son anti-modernisme, est sur la même longueur d’ondes que les nouvelles autorités haïtiennes.
» Le secteur privé haïtien, ne se sentira-t-il pas menacé par l’arrivée d’investisseurs étrangers qui peuvent bien lui ravir de grosses parts de marché?? À cette question, le ministre a répondu, et nous le citons: » le marché est ouvert, les possibilités de croissance sont énormes et je pense qu’une entreprise devrait se frotter les mains de savoir qu’une autre entreprise s’installe au pays « .
Ci-dessous l’intégrale de cette entrevue avec le ministre Wilson Laleau:
MÉDIAMOSAÏQUE: Wilson Laleau, vous êtes le titulaire du ministère haïtien du Commerce et de l’industrie, de passage au Québec officiellement dans le cadre du Forum d’Affaires Québec-Haïti, quels sont vos sentiments par rapport à cette deuxième édition?
WILSON LALEAU: Écoutez, je dois tout d’abord saluer l’initiative des organisateurs et Mme Nancy Roc en particulier, parce que cela a permis aux entrepreneurs québécois, canadiens et haîtiens de se rencontrer pour discuter et de voir les opportunités de part et d’autre, mais cela a permis au gvt haitien lui-même d’expliquer sa vision de l’avenir, c’était le but de ma présence et ce sont les propos que j’ai tenus lors de ce forum et j‘espère que le message a été bien reçu.
MÉDIAMOSAÏQUE: Sur toutes les tribunes, Michel Martelly, Laurent Lamothe, ne cessent de répéter: « Haïti est ouverte au business ». Est-ce un simple slogan, qu’est-ce qu’il y a de concret derrière cela?
WILSON LALEAU: « Ouvert au business », ça veut dire que c’est un processus. Les décisions que nous venons d’annoncer dans le cadre de ce forum ce sont des mesures qui sont de nature à lever les entraves, les obstacles à l’investissement et au développement des entreprises. Oui, Haïti est ouverte au business, on sait très bien que c’est une démarche qui prend un petit bout de temps, mais je vous assure que dans pas longtemps vous allez voir que la place occupée par Haiti dans le palmarès voué à l’investissement va changer considérablement.
MÉDIAMOSAÏQUE: En termes d’affaires et de relations bilatérales c’est quoi le poids du Québec et du Canada? Qu’est-ce que ce pays représente pour le gouvernement Conille et la présidence Martelly?
WILSON LALEAU: Le Canada, le Québec en particulier, avec Haiti ce sont deux endroits de l’Amérique qui partagent une langue et une culture. Quand le tourisme était à son meilleur en Haiti, les Québécois ont été nos principaux consommateurs en plus nous avons une communauté d’environ 150 000 personnes qui est relativement forte.
Il y a un marché qui existe au Québec pour des produits haitiens, mais il y a un marché haitien pour des produits québécois. Je persiste à croire qu’il y a des possibilités énormes de développer des affaires.
C’est des incitatifs qu’on doit mettre dans nos dispositifs institutionnels et réglementaires pour faciliter des investissements québécois en Haiti. Je pense ce qui est fait dans le cadre de ce forum ouvre la voie à de telles opportunités. Et les questions qui m’ont été adressées vont en ce sens, à savoir, comment qu’est-ce qu’on doit faire pour défaire ce parcours du combattant pour investir en Haiti? L’année prochaine si je suis toujours à ce poste je viendrai à ce forum pour détailler l’ensemble des pas qui ont été franchis en ce sens.
MÉDIAMOSAÏQUE: Vous vous donnez quoi comme unité de mesure, avez-vous un échéancier M. le mninistre: une année de travail?
WILSON LALEAU: Oui, nous pensons que sur une période d’un an que nous serons capables de prouver que des progrès ont été enregistrés et de montrer que ça va mieux et de montrer qu’il y a des entreprises qui ont été installées et qu’il y a un niveau d’investissements étrangers qui a augmenté dans le pays.
MÉDIAMOSAÏQUE: Le milieu d’affaires local auquel on reproche le manque de vision, l’anti-modernisme, n’est-il pas réfractaire, ne se sentira-t-il pas menacé par l’arrivée d’investisseurs étrangers qui peuvent bien lui ravir de grosses parts de marché?
WILSON LALEAU: La question paraît curieuse, parce qu’en vous entendant la poser, vous pensez que le secteur privé haitien n’aurait pas intérêt à voir d’autres investisseurs venir en Haiti. C’est illogique…
MÉDIAMOSAÏQUE: Mais, vu qu’ils sont en grande partie peu ouverts au changement, ne pensez-vous pas qu’ils pourraient avoir peur de la compétition par exemple. Digicel est arrivé et a tassé plusieurs dans le domaine de la téléphonie, pensez-vous que les concurrents sont contents?
WILSON LALEAU: Oui, mais écoutez, un investisseur étranger qui arrive emmène de l’innovation, de nouvelles façons de faire et de voir et ne s’intéressent pas forcément au même marché que les entreprises qui sont déjà installées. Et même si c’était le cas, c’est quand même un pays où le niveau de consommation est faible, où l’accès au service est très limité. Donc, s’il y a plus d’entreprises qui se créent ça veut dire qu’il y a plus d’emplois qui se créent ça veut dire qu’il va y avoir plus de revenus qui vont circuler et au final c’est tout le monde qui va gagner.
Aujourd’hui, le marché est ouvert, les possibilités de croissance sont énormes et je pense qu’une entreprise devrait se frotter les mains de savoir qu’une autre entreprise s’installe au pays. Sinon c’est illogique c’est même pas raisonnable. Je voyais pas la question sous cet angle-là, mais si c’est un fait, ce ne seraient pas des entrepreneurs. Un entrepreneur ne peut pas ne pas souhaiter que d’autres entreprises de s’installer parce que c’est cette dynamique qui va ouvrir son marché, qui lui donne des possibilités de faire des affaires plus importantes.
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PHOTOTHÈQUE MÉDIAMOSAÏQUE (Le ministre du Commerce et de l’Industrie d’Haïti, Wilson Laleau, à gauche, pose pour notre photographe en compagnie de la chargée d’affaires a.i à l’ambassade d’Haïti à Ottawa, Nathalie Gissel-Menos et du consul général d’Haïti à Montréal, Pierre-Richard Casimir.