Difficile d’avoir un profil tout à fait «obamien» en France où minorité rime rarement avec ascension sociale! Sauf que l’émergence du joueur de soccer Lilian Thuram ou de l’ex-ministre Rachida Dati ne laisse personne indifférent.
En effet, le spectaculaire changement qui s’est produit le 4 novembre avec l’élection d’un non-caucasien, un Afro-américain, à la tête de la plus grande puissance du monde pousse nombre de capitales occidentales à se poser la question: qu’avons-nous fait de notre diversité?
Si la question titille désormais tous les pans de ces sociétés, en France notamment, les journalistes et blogueurs ne sont pas en reste.Le chroniqueur Stéphane Dangel dont les articles sont publiés dans Le Post, la version 2.0 du prestigieux quotidien français «Le Monde», identifie lui deux potentiels Obama français.
Thuram, une histoire aussi captivante que celle de Barack
Son premier choix porte sur Lilian Thuram, le valeureux défenseur noir de l’Équipe de France qui avait permis aux Français (en battant la Croatie 2 buts à zéro) de se retrouver pour la première fois dans une finale de Coupe du monde de soccer en 1998.
Soulignant que «c’est l’histoire de Barack Obama qui a grandement contribué à le faire élire», Stéphane Dangel rappelle à ce titre que Lilian a «une véritable histoire». Selon lui, le parcours de Thuram, c’est celui «d’un gamin arrivé en métropole à l’âge de 9 ans, et qui est aujourd’hui le joueur le plus capé de l’Équipe de France de football, après avoir évolué dans les plus grands clubs européens.»
«Mais, Lilian Thuram n’est pas qu’un sportif : on le surnommait » le philosophe » pendant sa carrière sportive», s’empresse-t-il d’ajouter dans son papier dont des extraits sont publiés par l’Agence de presse «Média Mosaïque».
«Lilian Thuram est aussi membre du Haut conseil à l’intégration et est connu pour avoir des positions très claires sur le racisme, l’antisémitisme et, plus surprenant, la constitution européenne. Il est également membre du conseil d’administration du très respecté l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).
Les grands partis politiques ne s’y sont pas trompés : Lilian Thuram a refusé les approches du PS, des centristes tendance Bayrou, et un poste de ministre de la diversité aux côtés de Nicolas Sarkozy», a énuméré le chroniqueur pour camper le profil atypique de l’Antillais.
Mais la question qui s’en est suivie: comment peut-il faire son entrée politique? «S’adosser à un parti le lui permettrait, mais comment alors ne pas être un jouet dans les mains du parti… C’est plus sûrement en se positionnant comme inspirateur d’initiatives remarquables et à faire remarquer qu’il pourrait tracer son chemin», a analysé l’auteur de l’article du Post intitulé «Qui pourrait devenir l’Obama français?».
Rachida peut aussi rebondir et surprendre
La deuxième personnalité issue de l’immigration, qui a un brilant avenir devant elle, selon Stéphane Dangel, est Rachida Dati, l’ex-garde des sceaux de la République (d’origine maghrébine) qui vient d’être virée par le président français Nicolas Sarkozy.
«On la croit finie, enterrée dans un futur obscur de député européen à Strasbourg. C’est peut-être sa chance. Elle aussi a une histoire. Valable, intéressante. Une histoire basée sur une force de caractère et un rigorisme qui fait penser à Margaret Thatcher. Non, mieux, à une Sarah Palin. Sarah Palin, loin d’être enterrée, et à qui on prédit un avenir possible dans l’Amérique de l’après Obama», a calculé le chroniqueur.
Stéphane Dangel croit qu’«il faudra pour cela l’émergence d’une société où la rigueur, l’intransigeance, un côté borné aussi, seront les valeurs reines».
«Or, c’est bien vers cette société là que nous tendons depuis déjà un certain temps ; les sociologues sont assez unanimes. Fini l’esprit libertaire. Le nouveau rigorisme a d’autres visages que par le passé -actuellement il est plus orienté » dictature du développement durable « , pour caricaturer. La tendance peut s’accélérer dans des périodes de turbulences (Margaret Thatcher avait connu son heure de gloire au pire de la crise économique d’alors)…»
«Nous n’en sommes pas là, mais Rachida Dati a le temps, justement : d’être moins exposée, de prendre du recul, d’observer, d’analyser, d’attendre son heure. Tout l’art sera pour elle de ne pas disparaître complètement du paysage : elle aura les cartes en mains, au Parlement européen, pour porter des idées singulières ayant pour cadre l’Europe, et avec la légitimité de son mandat», a conclu Stéphane Dangel.
Et Rama Yade?
Soulignons que l’actuelle secrétaire d’État aux droits de l’homme, numéro 2 au Quai d’Orsay, née au Sénégal, Rama Yade, n’a pas retenu l’attention du chroniqueur du Post, a noté l’agence de presse «Média Mosaïque». À l’instar de Thuram ou tout comme Dati, son ex-collègue au gouvernement, Rama Yade a marqué les Français.
Hypermédiatisée, Rama Yade va souvent aux antipodes de la ligne adoptée par l’équipe gouvernementale, ce qui lui a souvent valu les foudres de bon nombre de ses collaborateurs au sein du pouvoir ou même de son chef Nicolas Sarkozy, accusé de la tolérer. Récemment, elle aurait dit non à Sarkozy qui projetait de la faire briguer un poste au Parlement européen.