La FPJQ parle diversité 42 ans après sa création (10e CONGRÈS-PRESSE)

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MONTRÉAL (MÉDIAMOSAÏQUE) – La Fédération professionnelle des journalistes du Québec a pris le pouls du monde médiatique ethnoculturel québécois, ne serait-ce qu’en l’espace d’une journée, lors de son dixième congrès annuel qui s’est tenu du 26 au 28 novembre dernier à Montréal.

Échanges inédits entre professionnels d’horizons divers

La journée du 27 novembre 2010 passera à l’histoire à la FPJQ qui, pour la première fois de son existence (42 ans), a compris qu’il était nécessaire d’insérer dans sa grille de conférences au moins un atelier sur la réalité et les défis auxquels font face les médias desservant les différentes communautés culturelles du Québec.

La thématique retenue pour l’occasion: «Les médias ethniques, si proches et si loin», illustre l’inexistence de rapports institutionnels  qui singularise les relations entre ladite fédération et cette presse de la diversité encore très peu encadrée, sous-financée, mal organisée, disposant d’un manque criant de ressources pour remplir efficacement son mandat.

Pour inaugurer cette main tendue de la FPJQ à ce secteur, quatre responsables de médias ethnoculturels ont été conviés à l’hôtel Hyatt Regency. Il s’agit de Norberto Aguiar, rédacteur en chef, Lusopresse (communauté portugaise), Abdelghani Dades, éditeur et rédacteur en chef de Atlasmedias (communauté marocaine), Jean-Ernest Pierre, PDG de la radio CPAM (communauté haïtienne) et Donald Jean, journaliste et PDG de l’Agence de presse MÉDIAMOSAÏQUE (interculturel).

Lors de cet échange d’environ deux heures, animé par la journaliste Martine Lanctôt (Radio-Canada), les panélistes ont été invités à esquisser un portrait de leurs médias respectifs et à partager notamment leurs pratiques quotidiennes journalistiques avec leurs confrères des médias traditionnels du Québec.


FPJQ: représentativité; pratiques journalistiques…

À l’instar de leurs homologues québécois qui peuvent faire l’objet de pressions dans l’exercice de leurs fonctions, Abdelghani Dades et Norberto Aguiar ont fait remarquer que les journalistes des médias de la diversité reçoivent également des pressions de la communauté desservie qui s’attend souvent à ce que le traitement de l’information soit différent ou prenne le contrepied de ce qui est diffusé par la grande presse. Sans oublier, «les remontrances du commerçant d’à-côté qui, en cas d’une couverture défavorable, vous menace de rompre son contrat publicitaire», a illustré Aguiar.

L’idée d’un assouplissement des critères d’adhésion à la FPJQ a été également évoquée par Abdelghani Dades. Cela pourrait, à son avis, faciliter la présence d’un plus grand nombre de journalistes de médias ethniques au sein de la fédération. De même, la nécessité pour l’organisation de se doter d’un représentant de ces médias a été soulevée par  Norberto Aguiar. La FPJQ, qui avait initié des démarches en ce sens, aurait abandonné ce projet alors qu’elle vient de créer en son sein un poste d’«administrateur région» pour les travailleurs de la presse évoluant dans les régions du Québec. Pourquoi pas un «administrateur communautés culturelles», s’est demandé, déçu, Aguiar.

Interrogé, par ailleurs, sur le choix d’émettre en français, Jean-Ernest Pierre dit admettre que la majorité des membres de la communauté haïtienne aurait aimé que sa radio (CPAM 1610AM) diffuse ses émissions en créole. M.Pierre affirme avoir délibérément opté pour le français pour faciliter l’intégration de sa communauté d’origine et pour permettre à la société d’accueil d’avoir une vue sur le vécu des Haïtiens, produit par eux-mêmes, au Québec. Jean-Ernest Pierre souligne que certains ont fait le choix d’émettre uniquement dans la langue d’origine de leur communauté, souvent pour faire passer des messages codés qui, s’ils étaient faits en français, auraient pu faire l’objet de poursuites judiciaires ou de plaintes auprès de la FPJQ.

Questionnements et commentaires

Dans l’assistance, des questionnements, des commentaires, fusaient de toutes parts. C’est le cas, par exemple, de Laura Julie de La Presse qui révèle avoir proposé à ses patrons un programme de stage qui permettrait à sa rédaction de dépister les talents des journalistes immigrants qui débarquent à Montréal. Projet intéressant mis sur la touche, parce qu’il y a toujours un problème de budget… Un autre responsable de média communautaire a, par ailleurs, apporté un correctif aux propos de Jean-Ernest Pierre du 1610 AM qui affirme ne pas se reconnaître dans le terme «radio communautaire» qui est, à son avis, une étiquette à connotation péjorative ou non professionnelle.

De son côté, la journaliste Brigitte Bougie, présentatrice à RDI, a dénoncé l’absence chronique de journalistes issus des communautés culturelles dans les différents événements ou congrès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ).  Quant à Abdou Zirat, qui en a profité de l’exercice pour présenter à l’assistance son nouveau M Magazine, desservant la communauté maghrébine, il s’est demandé, en tant que nouveau joueur dans le milieu de la presse ethnoculturelle, pourquoi après tant d’années d’existence la presse communautaire vit dans un tel dénuement au Québec?


Rapprochement professionnel: Timing favorable

Évoquant, de son côté, l’expérience de sa jeune Agence de presse, MÉDIAMOSAÏQUE, la première et la seule jusque-là spécialisée dans l’information ethnoculturelle au Québec et au Canada, Donald Jean a fait savoir que les médias de la diversité ont intérêt à travailler main dans la main pour pouvoir sortir de leur isolement. Il pense que ceux-ci desserviront mieux leurs publics en optant pour une plus grande vulgarisation des contenus,  une meilleure utilisation des ressources et deviendront plus efficaces sur le terrain.

Pour démontrer la proximité évidente du travail journalistique et pour éliminer la distance qui rend les médias ethniques «si proches et si loin» de la FPJQ, M.Jean a plaidé en faveur d’un rapprochement professionnel entre la presse de la diversité et les grands diffuseurs locaux et nationaux. À titre d’exemple, il a évoqué  la «Table de la diversité  2010 Médiamosaïque/Radio-Canada» qui a, selon lui, permis aux médias ethnoculturels de mieux côtoyer la SRC et vice versa. Donald Jean informe que son équipe travaille conjointement avec les médias ethniques et avec d’autres diffuseurs de la société d’accueil qui veulent suivre l’exemple.

MEDIAMOSAIQUE invitée au 10e Congrès annuel de la FPJQ

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PHOTOS MEDIAMOSAIQUE/Cr Hubert Molaire: En haut, les panélistes posent pour notre photographe en compagnie de la modératrice Martine Lanctôt. En bas, le panel au complet: de gauche à droite: Abdelghani Dades (Atlas Montréal), Donald Jean (MÉDIAMOSAÏQUE), Martine Lanctôt (RADIO-CANADA/FPJQ), Jean-Ernest Pierre (CPAM), Norberto Aguiar (LUSOPRESSE).