Inédit: Haïti revendique son « identité arabe » et lance le CHADEC

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MONTRÉAL (MÉDIAMOSAÏQUE) – Geste d’affirmation spectaculaire! La communauté arabe, dont l’hyperprésence dans l’économie haïtienne est un secret de polichinelle, s’affranchit aujourd’hui de son mutisme légendaire – en tant que groupe ethnique parfaitement épanoui dans sa terre d’accueil -, en lançant officiellement jeudi 30 janvier 2014 le Centre haïtiano-arabe pour le développement, l’éducation et la culture (CHADEC).

Cette minorité ethnique dont l’apparence physique se rapproche de celle des autochtones issus de l’élite mulâtre haïtienne, et qui s’exprime, à l’instar de tous les natifs du pays, dans un savoureux créole, sans accent,  a dû toutefois se battre, le business dans leur ADN aidant, pour se tailler une place enviable dans les plus hautes sphères de la société haïtienne.

Pour jeter ce pavé dans la mare, les signaux étaient, apparemment, tous au vert. L’Agence de presse Médiamosaïque a, en effet, appris que «c’est dans une ambiance festive que le CHADEC… (a été porté sur les fonts baptismaux) jeudi soir, à l’hôtel Karibe, en présence de certains hauts dignitaires de l’État et représentants du corps diplomatique», a rapporté le quotidien haïtien Le Nouvelliste.

Quid des objectifs du CHADEC?

La présidente du Centre, Anne-Marie Issa, figure connue du paysage audiovisuel haïtien, a clairement identifié les objectifs de ladite fondation. Celle-ci vise à participer, entre autres, à l’organisation des voyages tant en Haïti que dans les pays du Moyen-Orient et à la création d’un centre d’études haïtiano-arabe. « Pour atteindre nos objectifs, il nous faudra la collaboration de tous sans distinction aucune », a déclaré Mme Issa qui a également soutenu que l’amour et l’attachement qu’elle voue à « son pays, Haïti, et l’affection qu’elle porte à ses origines arabes ne sont pas à démontrer ».

De son côté, Georges Dagher, trésorier du CHADEC, – qui a parlé l’arabe pendant environ trois minutes pour la délectation du public – croit que jusqu’à présent les Haïtiens considèrent les descendants des migrants arabes comme des étrangers. C’est pourquoi, selon lui, les Arabes se sont très peu intégrés dans la société haïtienne. « Il est temps d’inverser cette tendance pour le progrès de notre pays », soutient-il, sans faire l’économie de souligner la nécessité de construire l’indéfectible union haïtiano-arabe.

Un parcours de combattant

Constitué de Maronites et de Juifs, originaires de la Syrie, du Liban, de la Palestine, de l’Egypte et du Maroc, ce groupe dont l’émigration en Haïti remonte aux années 1890, prit la fuite vers l’Amérique, persécutions de l’empire ottoman obligent,  et se propagea dans tout le Nouveau Continent

Arrivés en Haïti, le plus souvent par hasard, ces Levantins ne tardèrent pas à se lancer dans le petit commerce et parvinrent à s’intégrer dans la société haïtienne dans des circonstances pas tout à fait faciles. Ils ont fait du chemin. Le notaire Jean-Henry Céant, conseiller du CHADEC, a estimé que la « route est encore longue et parsemée d’embûches, de tracasseries et péripéties, de discrimination, de stigmatisation et d’exclusion caractéristiques de tout parcours d’émigration et d’immigration ».

Souvent victimes des soubresauts de la politique haïtienne et de sa législation de circonstance, les membres de cette diaspora, arrivés au XIXe siècle et se consacrant au commerce de détail, ont cependant fait du chemin et trouvé leur voie. « A force de travail sans repos, de savoir-faire et de débrouillardise, ils ont conquis des places enviables et ont pignon sur rue dans l’économie et la société haïtiennes », a poursuivi l’ancien candidat à la dernière présidentielle dans un discours en créole et en français, devant une assistance sélecte accrochée à ses lèvres.

Arabes devenus Haïtiens à part entière

Selon M. Céant, Haïti est une diaspora et participe de l’histoire des diasporas et ses racines rejoignent celles de tous les peuples et de toutes les diasporas en quête de sécurité identitaire et de stabilité sociétale. « L’on comprend aisément pourquoi Haïti, pendant tous les XIXe et XXe siècles, est devenue terre d’accueil pour les communautés arabe, juive, syrienne, palestinienne ou libanaise », a-t-il expliqué, soulignant qu’Haïtiens et Arabes, quoique d’origines diverses, sont de la même famille : celle de la conquête de soi, de la récupération des valeurs universelles de fraternité.

Aujourd’hui, il faut nous impliquer tous ensemble pour la sauvegarde de notre pays, a indiqué Jean-Henry Céant. « Sœurs et frères venus de diverses terres du Moyen-Orient, je vous convie à ce koumbit; je vous exhorte à la réalisation de cette œuvre commune. Vous êtes une partie d’Haïti. Une partie de la terre de Louverture, de Dessalines et de Boukman qui est devenue votre terre, notre terre à nous tous (…), a-t-il lancé, sous un tonnerre d’applaudissements. Arabes, Levantins, Libanais, Palestiniens, Syriens, Jordaniens, Juifs et Haïtiens ne sont plus des étrangers ! Nous sommes tous devenus Haïtiens et Haïtiens pour de vrai ! »

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Médiamosaïque avec Le Nouvelliste

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