Haïti: un coup d’État en gestation?

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Depuis la catastrophe du 12 janvier 2010, nous constatons une démonstration du verbe sans précédent dans le pays et ailleurs dans la diaspora haïtienne. Chacun présente son programme de reconstruction d’Haïti dans le style théorique le plus parfait. Certaines propositions évoquent même le changement de nom des ministères comme si le résultat d’un ministère dépend du nom qu’il porte.

 

On pensait que le séisme dévastateur du 12 janvier allait changer la mentalité de notre pseudo-élite. Au contraire, une partie de celle-ci renoue avec le concept de coup d’État, lequel facteur nous a mis là où nous sommes aujourd’hui. Le rapport d’enquête de la commission sénatoriale vient de le confirmer, il ne peut pas être plus clair. La minorité demande le renvoi total du Gouvernement  et du Président, tandis que la majorité opte pour le renforcement du Gouvernement actuel.

 

En fait, quelles sont les motivations à l’appui de ce potentiel coup de force?

Comme on le sait, la catastrophe du 12 janvier a attiré un capital de sympathie du monde entier à l’égard d’Haïti. La communauté internationale est mobilisée  et se donne pour objectif de jouer un rôle important dans la reconstruction d’Haïti. Plusieurs conférences et/ou rencontres ont déjà eu lieu et d’autres sont prévues  à cet effet qui pourraient déboucher sur des décaissements majeurs en faveur de la reconstruction nationale. Ce qui nous porte à croire que l’attitude de la minorité, à n’en pas douter, révèle  beaucoup plus une action intéressée en guise d’une action positive envers Haïti et les victimes du séisme.

Quant aux propositions de la minorité, que sont-elles?

Elles ne se résument ainsi :

– Le renvoi du Gouvernement et du Président;

– La mise en place d’un Gouvernement d’union nationale et d’un Conseil d’État.

Lesdites propositions ne sont en quelque sorte que du réchauffé. Nous pouvons faire référence au Conseil d’État sous la présidence provisoire d’Ertha Trouillot. Les divergences étaient si fortes entre les membres dudit Conseil que ce dernier était devenu non fonctionnel et la Présidence de son côté avait tout simplement ignoré son existence. Quant au Gouvernement d’union nationale, nous n’allons pas plus loin que la Présidence actuelle qui en a fait l’expérience. Le résultat, on le sait. Aucune action n’a été coordonnée dans l’esprit de la collectivité et de la politique globale du Gouvernement. La plupart des membres du Gouvernement d’union nationale ont plutôt travaillé au profit de leur secteur politique. Finalement, remplacer l’équipe actuelle, par qui? L’expérience de 2004 n’avait pas donné de résultats concluants. Alors, les faits sont là, les résultats sont vérifiables, il faut en tirer des leçons. Le sénateur Kelly C. Bastien a bien compris les basses manœuvres de la minorité. D’un côté, elle dénonce la légitimité de l’équipe actuelle et de l’autre côté, elle se sent confortable à prendre le pouvoir inconstitutionnellement.

 

Devant cette situation, nous recommandons au Gouvernement actuel de :

– Mettre tout en œuvre afin de loger provisoirement les victimes du séisme;

– Rendre fonctionnel le Conseil électoral provisoire;

– Permettre la participation de tous les partis politiques et candidats indépendants aux élections;

– Fixer les élections générales (Président, 1/3 Sénat, Députés, Maires, CASECS) au 7 février 2011.

 

Seul le peuple a le droit de choisir qui doit le représenter dans la reconstruction ou la refondation d’Haïti. Nous sommes les fils de Capois-La-Mort, nous n’avons pas peur de la mort. Séchons nos larmes et continuons de vivre.

 

 

*L’auteur, un Montréalais d’origine haïtienne, qui détient une maîtrise en administration publique, était le représentant de Fanmi Lavalas, le parti de l’ex-président Jean-Bertand Aristide au Québec. 

PHOTO MEDIAMOSAIQUE.Com/Cr France 2 ( Nicolas Sarkozy accueilli lors de sa visite en Haïti par son homologue haïtien René Préval, la première d’un chef d’État français depuis l’indépendance d’Haïti)