À la rencontre d’un éditeur «citoyen et militant»: Rodney St-Éloi

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MONTRÉAL (MÉDIAMOSAÏQUE) – Nous l’avions rencontré à l’occasion de la fête du livre. Ce rendez-vous qui attire des dizaines de milliers de visiteurs, constitue un moment de grosse visibilité pour  sa maison d’édition «Mémoire d’encrier». Très occupé à répondre aux questions des curieux et lecteurs de toutes origines qui fréquentent son kiosque au Salon du livre de Montréal, Rodney St-Éloi a pris quelques minutes de son temps pour nous parler de son bébé qui a révolutionné le milieu du livre au Québec.

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S’il devient l’éditeur qui met actuellement le plus grand nombre d’auteurs haïtiens (célèbres ou inconnus mais dont le talent surprend plusieurs) sur la mappe au Québec, Rodney St-Éloi l’est aussi, et le fait également avec autant de fougue, au profit de nombreux écrivains issus de plusieurs autres régions du globe, notamment de la Caraïbe, de l’Amérique latine, d’Afrique, du monde arabe.

Son profil d’éditeur citoyen, voire militant, séduit de plus en plus de lecteurs désireux de plonger dans des univers dont les échos sont très peu relayés à travers les grands canaux libraires, bibliothécaires ou médiatiques de la planète. 

Rodney St-Éloi se dit très satisfait du chemin déjà parcouru par sa maison d’édition. Cependant, il ne rate pas l’occasion d’interpeller la conscience des consommateurs auxquels s’adresse particulièrement l’offre de «Mémoire d’encrier».

Au Québec, par exemple, ses créations, qui comblent un vide abyssal, contribuent entre autres à meubler l’esprit de bon nombre d’enfants d’immigrants dépourvus de modèles et d’imaginaires qui leur ressemblent.

Entrevue Médiamosaïque/Rodney St-Éloi

Médiamosaïque: Rodney St-Éloi bonjour!

Rodney St-Éloi: Bonjour Médiamosaïque

Médiamosaïque: Le kiosque de «Mémoire d’encrier» est bien visible cette année encore. Pourquoi, selon vous, il faut être présent au Salon du Livre de Montréal?

Rodney St-Éloi: Un salon du livre, c’est des pays qui s’expriment. La France s’exprime, vous voyez Gallimard, c’est la France. Quand vous voyez Mémoire d’Encrier, c’est Haïti, c’est les Indiens, c’est l’Afrique, mais c’est aussi une part d’Haïti. Il y a aussi un certain nombre de figures mythiques, comme Monsieur Toussaint d’Édouard Glissant, par exemple. Souvent, c’est bilingue, c’est les langues aussi. C’est le seul endroit où les gens peuvent se procurer des livres en créole, en innu, en espagnol, en anglais. On fait beaucoup de traduction, il y a un grand travail de communication.

Médiamosaïque: Et le public qui découvre cette offre, comment réagit-il?

Il est étonné de voir que cela existe, parce qu’il ne savait. On ne lui avait pas dit qu’il pouvait lire Frankétienne, Gary Victor,  sans se rendre en Haïti.

C’est aussi être en contact avec des livres qui nous étonnent, qui ne sont pas nécessairement des best-sellers, mais qui font calmement leur chemin et si tu vois, dans le regard des gens, c’est comme de l’innovation: ils découvrent une géographie populaire de la Caraïbe. Les gens disent souvent que c’est un lieu patrimonial ça Mémoire d’encrier! Et c’est comme cela ce qu’on veut que ça  se passe…

Médiamosaïque: Quand vous publiez des très connus et des moins bien connus, c’est quoi le but?

Rodney St-Éloi: Quand les gens voient et rencontrent Dany Laferrière, ils voient par la même occasion « Les brasseurs de la ville », d’un jeune auteur haïtien que moi-même je ne connaissais pas, il y a deux ans. Ce n’est pas mon cousin. On le voit parce qu’il a du talent. Et c’est aussi cela, Mémoire d’encrier offre aussi la possibilité aux jeunes de montrer leurs talents.

Médiamosaïque: Comment cela se passe? Vous faites quoi pour repérer le bon auteur ou le bon ouvrage?

Rodney St-Éloi: On travaille beaucoup avec la relève en Haïti parce qu’il y a un problème là-bas. C’est un pays qui a des habitudes de monopole. On peut entendre les mêmes noms de famille. C’est souvent ainsi, les mêmes noms qu’on entend en politique, sont les mêmes dans la répartition des richesses nationales et aussi dans la littérature et ce n’est pas possible! Il faut que les lecteurs qui viennent ici trouvent des noms qu’ils n’ont jamais entendus. On ne veut pas de fils de…, de cousin de… On publie des auteurs, des gens qui ont du talent. Et notre souci c’est de les faire circuler parce que chez nous il y a un côté citoyen, un côté politique, visant la construction du pays…

Médiamosaïque: Félicitations et bonne continuité!

Rodney St-Éloi: Merci à vous Médiamosaïque!

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